Très cher Yves, autoproclamé le Vieux
Dès ton plus jeune âge tu as su prendre tes responsabilités. En aout 1946, Maman, notre mère courage, s’est retrouvée veuve avec 7 enfants âgés de 1 à 16 ans. Tu étais l’ainé et tu as assumé sans jamais faillir le rôle de paterfamilias, de guide pour chacun d’entre nous.
Tu as toujours été présent, attentif et bienveillant. Pour ma part je te serai toujours reconnaissant de ta présence et de ton aide précieuse quand j’ai « trébuché » en 5e et ai été exclu de Montesquieu (où tu avais déjà sévi, avec Jean-Claude, Bernard et Michel). Le professeur principal, qui m’avait pris en grippe ne voyait en mois qu’un futur maçon, menuisier ou peintre étant au-dessus de mes compétences. Maçon était un métier honorable, mais ne correspondait pas à mes aspirations. Tu es intervenu en véritable chef de famille, pour m’ouvrir d’autres perspectives. C’est grâce à toi que j’ai pu poursuivre mes études au Lycée de Bayonne et trouver l’élan nécessaire pour avancer et poursuivre mes études supérieures.
Tout au long de nos vies, tu as su être là dans les bons comme dans les mauvais moments. Tu t’intéressais à chacun de nous, parfois avec insistance, mais toujours avec sincérité, car derrière tes questions se cachaient une réelle attention et un profond attachement.
Ta sensibilité t’a souvent trahi, même dans les instants les plus heureux. Je me souviens de ton malaise le jour de mon mariage, sans doute l’émotion de voir « le petit dernier » se marier, tu n’as pu y assister !
Plus tard lorsque j’ai été rapatrié sanitaire de Etats Unis, tu es venu me voir à l’aéroport de Roissy : j’étais couché dans une ambulance qui me transférait à Orly. Re-malaise : le service d’urgence est venu aussitôt et a demandé à Michèle ce qu’avait eu son mari, elle leur avait confirmé que c’était son beau-frère et que son mari était dans l’ambulance !!!
Au décès de Maman en 1992 tu as repris le relais et joué le rôle de pilier incontournable de la famille. Tu as servi de trait d’union de la famille. Tu avais un rituel de téléphoner régulièrement à chacun d’entre nous, et de transmettre les nouvelles, maintenant un lien si précieux entre nous tous.
Tu étais pourvu d’un certain humour « saubaduesque » : en 1968 lorsque tu as fait un séjour de 2 ans en Algérie, tu avais visité le Sahara avec Paulette dans la chaîne Transat et tu avais adressé une carte postale dithyrambique à notre famille landaise : « c’est un pays magnifique, accueillant, les gens sont d’une amabilité extrême, tout est propre …signé Pa Vertat (pour les non-initiés en occitan sa signifie « ce n’est pas vrai ») ». Un clin d’œil pour déjouer la censure.
Tu as toujours été curieux de tout, une véritable encyclopédie. Près de ton fauteuil Le Monde, le Figaro et le Canard Enchainé se côtoyaient. Tu as su très tôt t’approprier l’outil informatique pour lire la presse étrangère en anglais ou en espagnol et partager avec tous les dernières infos qui te semblaient intéressantes. Tu avais soif d’apprendre et de comprendre et de transmettre. Epris de culture politique, économique et générale, tu adorais dévorer les livres. Lorsque les informations passaient sur la radio ou la télévision, c’était un moment de recueillement, nous devions nous taire. Tu étais doué d’une grande mémoire fidèle, qui ne t’as jamais quittée. Tu avais appris très jeune l’occitan pour communiquer avec les fermiers et une partie de notre famille landaise qui utilisait très peu le français.
Ton esprit pétillait aussi à travers les anagrammes, parfois corrosifs mais ingénieux : Nicolas Sarkozy : « Carla soyons ski », Alain Juppé : « j'ai un appel », Lionel Jospin : « le joli pinson », et le moins tendre, c’est le hasard, François Hollande : « lardon hélas nocif » ...
Nous n’étions pas toujours d’accord, mais le respect et l’estime mutuelle ne nous ont jamais quittés ! Tu aimais débattre, convaincre, partager ; toujours à l’écoute.
Tu aimais la vie, tu t’es accroché avec force et courage. Tu as aimé ta famille proche comme moins proche. Jusqu’à ton dernier souffle, tu as été entouré de l’affection de Paulette, de Joëlle et Stéphane, de Clare et de tes nombreux petits-enfants et arrière-petits-enfants et du reste de ta grande famille.
Aujourd’hui, Michèle, Frédéric, Valérie et moi t’adressons nos plus affectueuses pensées. Yves, tu demeureras à jamais dans nos cœurs et dans nos mémoires.